La Passion d’Augustine de Léa Pool
Réalisé par Léa Pool
Canada (Québec)
Sortie 30/03/2016
Durée : 103 min
Avec : Céline Bonnier, Lysandre Ménard
Distributeur : KMBO
La passion d’Augustine retrace l’histoire d’un couvent de bonnes sœurs dans les années 60. Alors que les jeunes filles étudient avec soin la musique et les bonnes œuvres sous le giron de mère Augustine, alors que les réformes sociales viennent mettre en péril la situation du couvent, une jeune prodige du piano, nièce de Mère Augustine, vient chambouler un peu plus la vie du couvent.
On ressort de ce film touché. Touché par l’histoire de ces sœurs qui donnent toute leur vie à une cause et un Dieu qui s’évanouissent petit à petit. Pourrions-nous être sincèrement virulents contre l’Eglise, nous n’en serions pas moins conduits à reconnaître ce que celle-ci a parfois de résolument humain. Le film parvient à dresser un portrait de bonnes sœurs à la fois sévères et sensibles, dures et dévouées. Sans doute pouvons-nous de temps à autre regretter que l’histoire n’approfondisse pas assez certains personnages : l’essentiel du récit reste centré sur Alice et sa tante, la mère Augustine. Oscillant entre drame et légèreté, la vie de ces deux femmes organise et structure le film, par touches de tendresse, de colère et de larmes.
Lysandre Ménard, l’actrice incarnant la jeune prodige, signe un premier rôle encourageant. Pianiste brillante, ce sont ses professeurs qui l’ont recommandée à l’équipe du casting. Sans doute Alice débute-t-elle dans ce couvent un peu comme son interprète débute au cinéma, avec un jeu plutôt fin, que l’on sent pourtant hésitant par moment, mais toujours juste. Quant à mère Augustine, on ressent à travers Céline Bonnier une religieuse qui se bat toujours pour ce en quoi elle croit, prête à tout faire pour permettre à ses deux amours de perdurer, le couvent et la musique. C’est un jeu sans fausse note, entre doutes obsédants et certitudes, qui arrive à donner au personnage de mère Augustine une réelle profondeur, qui donne envie d’en savoir toujours un peu plus sur son histoire.
Ce film ne trouve pourtant pas toutes ses ressources dans la narration. On retrouve de temps à temps de belles images du Québec, province régulièrement enneigée, aux escaliers si typiques devant l’entrée des bâtisses, et aux vols de migration des oies sauvages, qui viennent donner un cachet plus bucolique à l’ensemble.
Il fut difficile en voyant ce film de ne pas le relier à Des Hommes et des Dieux (2010), dans la façon que peuvent avoir des gens consacrant leur vie à Dieu de se battre pacifiquement pour la survie de leurs idées et de leur mode de vie. Par d’autres aspects, on croirait voir un peu de Whiplash (2014) dans la relation initiale entre Mère Augustine et Alice, dans l’idée de présenter une œuvre musicale à un concours à la fin du film, sans pourtant aller dans la violence de celui de Damien Chazelle.
Cependant, il faut au final se rendre à l’évidence, le film reste sage et il ne faut guère plus d’un quart d’heure pour envisager les événements de la suite. Dommage, mais sans doute faut-il voir dans ce film des ambitions plus simples, autour d’un plaisir musical et une envie de retranscrire généreusement un peu de l’histoire des couvents au Québec. Au détour de certaines scènes parfois un peu prévisibles, le fond reste touchant, sans prétention et simple, avec tout de même certaines scènes assez intenses auxquelles la simplicité est un réel atout. Nous conseillons donc à tous ceux qui ont aimé des Hommes et des Dieux de donner une chance à ce film, qui garde une certaine honnêteté et présente des personnages assez variés pour qu’on s’intéresse à chacun d’entre eux, dans un casting aussi féminin que le film de Xavier Beauvois était masculin, avec ce petit côté musical en plus qui offre tout de même de beaux moments de musique classique au cinéma.
Luc Menneteau