Un regard sur… Cutter’s Way, de Ivan Passer.

Un regard sur… Cutter’s Way, de Ivan Passer.


Un film qui s’ouvre avec le gros plan d’une généreuse moustache ne laisse aucune place au doute, nous voilà plongés aux Etats Unis, quelque part dans les années 1970.

Cela dit, une précision s’impose au sujet de ce film. Cutter’s way est une sorte de polar. Du coup, l’intrigue est connue : un meurtre, un témoin, une silhouette suspecte qui s’évade dans la nuit, un détective, une enquête.
En l’espèce : Après une sortie nocturne à but accessoirement commercial, Richard Bone, séduisant vendeur de bateaux et porteur de la moustache sus-citée, passe dans une ruelle dans laquelle son véhicule tombe en panne. Dans cette ruelle, il manque de se faire renverser par une voiture dont le conducteur semble peu enclin à lui venir en aide. Dans cette ruelle, le corps sans vie d’une pom pom girl est retrouvé le jour suivant.
Au mauvais endroit au mauvais moment, Mr Bone passe de simple témoin à premier suspect, et semble à peu près s’accommoder de la situation.

C’est là qu’intervient son meilleur ami, Alexander Cutter, joué par l’incroyable John Heard, qui s’empare de l’enquête. Si on se fie aux premières impressions qu’il nous laisse, Bone aurait pu trouver meilleur détective. Alcoolique et imprévisible, ce vétéran du Vietnam est ce compagnon gênant qu’on hésite un peu à présenter à sa famille ou ses copains du boulot.
Bien résolu à prouver l’innocence de son ami et briser cette routine de l’autodestruction, Cutter est convaincu de la culpabilité du mystérieux conducteur, que Bone ne tarde pas à identifier. Il s’agit de JJ Cord, un riche homme d’affaires dont le pouvoir et l’influence n’en font pas le suspect idéal. Aux yeux des spectateurs, cet homme reste un mystère, caché derrière l’étincelant reflet de ses lunettes de soleil. Mais l’important est ce qu’il incarne pour l’illuminé Alexander Cutter, qui en fait l’archétype d’une classe dominante célébrée au grand jour, œuvrant impunément dans l’obscurité. Cette enquête est ainsi la revanche de Cutter sur ces nantis responsables de la guerre du Vietnam, qui a laissé sur son corps de nombreuses marques et une blessure morale sur les Etats-Unis. Si ce film est loin d’être la seule exploration cinématographique de ce sujet, il s’empare des codes du polar pour en proposer un jugement d’une profondeur inattendue. Cette balance réussie entre intrigue et message politique, qui ne s’écarte jamais du pur divertissement cinématographique est le propre de classiques du genre tels que Shaft de Gordon Parks.
Elle fait de ce film beau comme un soleil californien une sortie à ne pas louper le 25 juin prochain.

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